vendredi 16 mars 2018

Mode et Mœurs : Kinshasa : tout est noir comme la misère

Kinshasa (Photo. Benji)

II est 19 heures 30’ au Camp Kauka un des quartiers de la  commune de Kalamu, dans la ville de KInshasa, alors qu’une lycéenne s’apprête à mettre au propre son devoir, soudain, une brusque coupure d’électricité. La petite crie: « Maman où se trouvent les bougies ! Comme à l’accoutumée, la société nationale de l’électricité n’a pas pris soin d’annoncer cette coupure à ses abonnés du secteur.


Sur la véranda, une bonne femme s’affaire à dénouer là couche de son bébé avec l’aide de l’éclairage d’un téléphone portable VIP. C’est alors qu’en ce moment, dans une terrasse du quartier 20 mai, un jeune homme entame sa deuxième bouteille de bière. Il se rend compte qu’il est dans le noir, les barmaids s’affairent à éclairer le périmètre avec l’aide d’un groupe électrogène de seconde main, il s’en suit alors un véritable tapagé aux oreilles de clients de sa terrasse, la musique est relancée en plein décibel tant soit peu pour surmonter les grondements de cette machine d’origine chinoise.  Ce jeune homme doit causer alors à tue-tête avec son ami.

Aux abords de la rivière Kalamu, une maman s’affaire à regrouper ses enfants à la sortie de l’Eglise dans la mesure où ce cours d’eau n’a pas des  garde- fous, dans le noir tout peut arriver. Sur un autre flanc de la même rivière, un groupe de jeunes gens s’activent à lancer de pierres à un couple d’amoureux en état d’ébriété.  Ils ont eu le malheur de s’amouracher peu avant sous la pleine lune dans la broussaille environnant le stade Tata Raphaël au point de choquer les bonnes mœurs. C’est dans l’obscurité qu’ils détalent sous les hués des badauds et autres curieux en colère à la suite de cet acte. Un des partenaires a laissé même son soutien-gorge sur la branche d’un arbuste souillé. 

Et tout au long de l’avenue Victoire non loin de la maison communale de Kalamu, les habitants sortent de leurs habitations avec des chaises en plastique à la main justifiant la chaleur suffocante qui gagnent leurs parcelles à la suite de cette coupure d’électricité. Ces paisibles citoyens doivent faire face aux phares de véhiculés qui dérangent quelque peu leur intimité familiale. « On est à Kinshasa, il faut vivre avec ses misères au quotidien... » Lâche un père de famille à son épouse qui fatiguée, doit abandonner son réchaud à deux plaques pour recourir à la braise avec  toutes les conséquences dans son maigre budget. Quelques instants après, « Pétrole yango oyo somba limba», les petits vendeurs ambulants de pétrole gagnent les rues de Matonge sous un vacarme de concert des  bouteilles pour attirer  l’attention des potentiels clients. Des telles scènes sont monnaie courante à Kin, il faut savoir aussi faire face à l’obscurité,  aux moustiques et aux  prostitués qui aiment les noirs. Et surtout, il faut savoir rentrer de bonne heure de peur d’être surpris par des jeunes délinquants communément appelés Kuluna.  D’une part, ces derniers sont retranchés dans les tunnels de Kalamu et autres coins de rue pour extorquer des biens,  commettre de forfaits de tout genre et autres coups et blessures  sur des paisibles citoyens.

D’autre part, c’est vers 20 heures 30’, que les bana nyoka gagnent les périmètres du stadium YMCA. En ce lieu, c’est la prostitution artisanale parce que le travail de sexe se déroule sans  normes. On voit certaines femmes professionnelles du sexe  allaitant leurs nourrissons d’une main et sollicitant  le sexe dans autre.  « Papa okomata mpunda te, eh !  S’exclame un sexagénaire en mal d’amour. II n’avait qu’une maigre somme d’argent dans sa poche. « Likambu te papa na nga  ata demi terrain…», l’homme à la calvitie attiré par cette offre alléchante, a fini par perdre son téléphone. Il s’en est rendu compte alors qu’il tirait sa braguette pour continuer sa route. La petite a détalé  d’un trait comme une étoile filante dans l’obscurité des rues de Matonge après son sale coup. Malgré cela, certaines personnes souvent à l’état d’ébriété n’hésitent pas à négocier dans l’obscurité aidant une partie de jambes en l’air au prix modique, misère oblige. Ils assument aussi le risque d’attraper le VIH/Sida en toute irresponsabilité.

Saint Hervé M’Buy

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