Le téléphone portable, l'internet, la télévision et la radio font partie des technologies de l'information et de la communication (TIC). Ces outils révolutionnaires qui ont vulgarisé l'information, rapproché les civilisations, les communautés et les personnes et délié les langues, même dans les Etats dirigés par les gouvernements les plus totalitaires. Avec les TIC, l'accès à l'information est devenu moins coûteux, plus rapide et donc plus accessible. Mais justement, par ce que les frontières sont plus fines, les barrières se brisent et nous assistons à des violations de vie privée, au harcèlement et à d'autres abus désormais plus faciles à commettre et dont l'anonymat est souvent garanti pour leurs auteurs.
Les premières victimes de ces abus par le biais des TIC, ce sont les femmes, surtout celles vivant dans les pays du tiers monde. Moins nombreuses à maîtriser ces puissants outils, les femmes subissent quotidiennement ces atteintes à la vie privée, des menaces et font l'objet de discrimination sans qu'elles puissent riposter. Pire, dans la plupart des cas, elles ne peuvent bénéficier des avantages que leur offrent les TIC, ni faire face à ces violences.
Une étude menée récemment par l'Association pour le Progrès des Communications (APC) dans 12 pays du monde a confirmé cette dure réalité. En Afrique, quatre pays dont la République Démocratique du Congo, ont été ciblés par cette étude. Sauf que entre les chiffres et la réalité propre à chaque pays, il existe peut être une marge, chaque contrée étant en butte à ses propres problèmes et à sa culture.
Par son Programme d'Appui aux Réseaux des Femmes, L'APC a mis en œuvre un projet intitulé «Renforcer l'usage stratégique des technologies de l'information et de la communication (TIC) par les femmes pour la lutte contre la violence à l'égard des femmes et des filles». Sylvie Niombo est la coordonnatrice régionale de cette association pour le Congo et la République Démocratique du Congo. Elle est aussi une des coordonnatrices de l'APC-Femmes-Afrique.
Ce projet vise d'abord à déceler les problèmes propres à chaque pays concerné pour ensuite y faire face. Pour y parvenir, un atelier stratégique national sur l'usage des TIC par les femmes pour la lutte contre les violences à l'égard des femmes et des filles a été organisé à Kinshasa. C'était le tout premier du genre.
Ce projet vise d'abord à déceler les problèmes propres à chaque pays concerné pour ensuite y faire face. Pour y parvenir, un atelier stratégique national sur l'usage des TIC par les femmes pour la lutte contre les violences à l'égard des femmes et des filles a été organisé à Kinshasa. C'était le tout premier du genre.
Une trentaine de personnes venant des organisations des droits des femmes, des organisations de défense des droits de l'Homme, des organisations internationales, du secteur privé et des institutions gouvernementales, y ont participé. Ils ont pu suivre divers exposés sur le sujet et travailler en groupe afin d'explorer et comprendre les intersections entre les violences à l'égard de la femme et les TIC.
Ces assises de deux jours ont été organisées par «Si Jeunesse Savait », organisation de jeunes féministes qui appliquent le projet du PARF-APC en RDC. L'objectif était de développer des stratégies pour trouver des solutions collectives et intégrées afin de mettre fin à la violence faite aux femmes et aux filles, avec une attention particulière sur les politiques et interventions axées sur les TIC.
Pour parler des violences des TIC à l'égard de la femme, il a fallu faire un bilan des différents cas avérés. L'avocate Josepha Pumbulu, de l'association africaine de défense de droits de l'Homme, ASADHO, a fait ressortir que le phénomène de violences faites aux femmes n'est pas nouveau. La femme et la jeune fille subissent continuellement des violences sous plusieurs formes. Au foyer comme au travail, en temps de guerre comme en temps de paix, ces violences s'incrustent toujours dans la société.
Mais avec les TIC, ces violences ont de nouveaux vecteurs. On le voit même dans les médias. Les femmes sont non seulement sous-représentées dans les médias - une étude menée dans 13 pays de l'Afrique australe par Gender Links et l'Union Congolaise des Femmes des Médias le démontre bien - mais une autre étude de base sur le genre et le VIH/Sida, menée en 2007/2008 par ces deux organisations, révèle aussi que les médias renforcent les stéréotypes flagrants ou subtils à l'égard des femmes. C'est ce qu'explique Anna Mayimona de l'UCOFEM et de Gender Links.
Dans les médias, les femmes sont présentées dans des rôles stéréotypés, par exemple comme victimes ou objets sexuels tandis que les hommes, eux, sont montrés comme des hommes d'affaires florissants. Sans parler des stéréotypes subtils qui se glissent dans les phrases, les émissions et le choix des invités sur les plateaux de télévision. De plus, la couverture propre au genre est extrêmement faible. Elle représente seulement, 1.4 % des nouvelles analysées dans les médias de la RDC.
Anna Mayimona est en faveur de la sensibilisation des journalistes hommes comme femmes afin qu'ils soient plus sensibles aux questions du genre. Les médias influencent la population, ils doivent donc donner le ton dans la lutte contre les violences faites à la femme. L'objectif de la parité dans les rédactions et les postes de décisions des chaînes de télévision doit être atteint dans les plus brefs délais.
C'est cette piste qu'explore l'APC: former les femmes aux TIC pour qu'elles se défendent contre les violences qui leur sont faites par ces moyens et s'en servent pour mieux faire entendre leurs voix. Consacré à l'autonomisation et le soutien aux personnes qui travaillent pour la paix, les Droits de l'Homme, le développement et la protection de l'environnement par l'usage stratégique de l'information et de la communication, son programme d'appui aux réseaux des femmes a reçu une subvention par le biais du Fonds OMD3 qui parle d'Investir dans l'égalité. Ce projet de deux ans vise à aider les femmes à négocier le terrain miné des TIC où les libertés vont de concert avec les préoccupations croissantes sur la vie privée et la sécurité.
Plusieurs propositions, suggestions et recommandations ont été faites pendant cet atelier, notamment qu'il faut réactiver la ligne verte pour les femmes violées ou en danger et organiser des formations sur les TIC. Les plus intéressantes seront exécutées grâce au financement de l'APC. Les seize jours d'activisme contre les violences faites à la femme seront une occasion propice pour appliquer certaines d'entre elles.
Mila Kimbuini Paulo est journaliste en République Démocratique du Congo. Cet article fait partie du service d'opinions et de commentaires de Gender Links.
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