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Freddy Tsimba |
C’est à travers ses sculptures expressives et
aux tailles monumentales que Freddy Tsimba dresse avec rigueur les aspects
néfastes de la guerre, la conjoncture congolaise et ses cohortes de malheur.
Des personnages torturés côtoient son art
symbolique d’une écriture sculpturale expressive. Pour ce faire, cet artiste
sculpteur recourt particulièrement aux matériaux de récupération. Et
après, dans le grand secret de son atelier en plein cœur du quartier Matonge
dans la commune de Kalamu à Kinshasa, il donne une vie artistique à toutes ces
ferrailles ramassées ici et là, particulièrement dans les rues de Kinshasa.
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une œuvre de l'artiste |
Dans ses réserves, l’artiste rassemble avec
une certaine touche de philosophie entre autres les douilles de cartouches
ramassées, des cuillères usées et autres ustensiles de cuisine. Sa démarche
artistique le pousse par moment à sacrifier même ses propres chaises en
plastiques pour arriver à ses fins. Et de ces matériaux, il donne un sens à ses
compositions qui dénoncent en général les anti-valeurs.
Des œuvres qui
exorcisent la souffrance…
Dans certaines de ses œuvres, il
témoigne de la violence de la guerre.
Dans sa démarche artistique teintée un peu
d’une touche d’universalisme, l’artiste retrace les guerres d’ici et
d’ailleurs, le déplacement forcé des populations avec leur cohorte de malheur,
les enfants soldats, le viol des femmes, la naissance des enfants de la guerre,
la misère, l’effondrement de valeurs fiduciaires, les chômages bref les
questions essentielles et universelles qui constituent dans certains cas les
contours néfastes de la guerre.
« Je suis un sculpteur des larmes, mais
d’espoir. Je n’aime pas la souffrance. Mes œuvres tentent d’exorciser la
souffrance », a déclaré Freddy Tsimba.
Pour l’artiste, la culture contribue
énormément à la paix en RD Congo aux côtés d’autres richesses du pays.
« Je crois à l’art. La culture constitue une richesse pour la RD Congo.
Une richesse qui n’a pas fait couler le sang par rapport au coltan et autres
minerais,… », a renchéri l’artiste.
Des douilles qui
témoignent la violence…
De ses inspirations, Freddy Tsimba est
allé un peu plus loin dans sa démarche artistique, au delà de son atelier. Des
douilles ramassées aux lendemains des différents théâtres de barbarie à
Kinshasa, Freddy Tsimba a dressé des compositions révélatrices.
Telle dans l’œuvre dénommée « Au delà
des extrêmes », cette composition présente une femme qui plane avec des
douilles au ventre. De même que dans « Victime malgré elle » où la
composition repose sur des douilles fragmentées donnant vie à un corps
expressif. Cette œuvre a été primée Médaille d’argent, aux jeux de la Francophonie,
en 2001. Et particulièrement dans « Mabele ba bosana », l’artiste
plasticien dresse neuf sculptures choquantes. Freddy Tsimba présente des
ventres brûlés de femmes et éventrés par l’enfer de la guerre. Il dispose ses
œuvres à la chaîne, donnant l’impression d’une hécatombe. Il poursuit dans
« les larmes des oubliés », en exposant des chaussures de fortune
pendantes, un témoigne de la misère.
L’attrait de l’artiste pour ses matériaux,
c’est une manière pour l’artiste de dénoncer et d’oublier en même temps une
plaie historique de son pays, la guerre. Ces douilles qui ont hier arraché des
vies humaines dans le champ de bataille, l’artiste sculpteur les redonnent une
seconde vie, cette fois, artistique.
Pas de bouffe! Les cuillères dans
la poubelle
Dans le même registre, il exploite aussi des
cuillères usées ou encore abandonnées dans les poubelles de Kinshasa par leurs
propriétaires. Ceux-ci ne mangent pas à leur souhait, forcé par la
conjoncture et la misère. Certains ustensiles de cuisine ne servent plus à rien
pour certains de ses compatriotes. Ces couverts peuplent les poubelles de
Kinshasa. L’artiste en fait usage en l’exploitant dans ses compositions pour
dénoncer cette misère.
Des voitures en fil de
fer aux œuvres monumentales
Né à Kinshasa en 1967, Freddy Bienvenu Tsimba
est diplôme de l’Académie des Beaux-arts de Kinshasa, en option sculpture
monumentale. Il est détenteur de la médaille d’argent des Jeux de la
Francophonie, à Ottawa, au Canada en 2001. Entre autres mérites, il a été gratifié
d’un diplôme d’honneur, lors du salon international des arts plastiques, à
Béziers. L’artiste a été l’ambassadeur de la RD Congo dans plusieurs festivals
à travers le monde. Dans son quartier de Matonge, il ne s’imagine pas dans sa
tendre jeunesse qu’en fabriquant des modèles de voitures en fil de fer
qu’il s’effraye un avenir radieux dans le monde de la sculpture congolaise.
Freddy Tsimba à ce jour exploite le bronze, le métal, la terre et le
ciment. Ce sculpteur a imposé sa discipline artistique dans un univers
des créateurs le quartier Matonge à Kinshasa où se croisent sapeurs, musiciens
et autres vendeurs des brochettes. De Kinshasa, capitale de la sape et de
la musique congolaise, Freddy Tsimba se révèle dans ses créations monumentales.
Saint Hervé M’Buy
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